Dictionnaire Céline

Le Dictionnaire Céline, procuré par Philippe Alméras, est donc paru. Idéalement – comme je l’ai indiqué ici même – ce type d’ouvrage devrait être le fruit d’un travail d’équipe. Il en fut d’ailleurs question un moment. Ses pairs ayant décliné l’invitation, l’auteur s’est résolu à le rédiger entièrement seul en un temps record. Folle gageure. Le résultat n’est pas à l’abri des critiques, loin s’en faut. Et il est autant célinien qu’almérassien, tant les jugements de l’auteur affleurent dans les commentaires. C’est sa faiblesse et, en même temps, son originalité. Faut-il pour autant le jeter aux orties comme d’aucuns l’affirment ?  « Tout ce qui est excessif est insignifiant » (Talleyrand).

Dès lors que l’on publie, on s’expose à la critique. Ayant accepté de proposer quelques ajouts et corrections avant parution, je me suis interdit de commenter cet ouvrage, optant pour un entretien avec l’auteur (BC n° 258). Un ancien collaborateur du Bulletin procède, lui, à un éreintement en règle, et c’est son droit le plus strict ¹. Il relève même les coquilles, exercice qu’il n’appréciait pourtant guère lorsque certain recueil auquel il collabora en fit les frais. Cela prouve au moins une chose : ce qui est admissible dans un cas ne l’est pas forcément dans un autre.

Si la lecture de ce dictionnaire est jugée agréable (c’est déjà ça), il lui est reproché de n’être ni complet ni toujours précis. Ces deux reproches sont certainement fondés. Mais était-il indispensable qu’une aigreur persistante se propageât d’un bout à l’autre de ce compte rendu ? Et surtout qu’elle s’exerçât, de manière répétée et déplaisante, à l’égard du Bulletin célinien qui n’en peut mais ? Faut-il rappeler que je ne suis ni le co-auteur, ni même l’éditeur de ce dictionnaire ? Cerise sur le gâteau : il est dit qu’en définitive, cet ouvrage satisfera la presse people et… ledit Bulletin, mais en aucun cas les amateurs sérieux. Curieux amalgame et lourde vacherie envers un périodique auquel on ne dédaigna pas de collaborer pendant des années. Notre spécialiste estime enfin qu’un tel dictionnaire nécessiterait plutôt deux volumes. Et pourquoi pas trois ? Tant mieux, après tout, si le fait d’avoir été « luxé au poteau » ne suscite pas le dépit, mais plutôt l’envie de faire mieux. Quoique ce ne soit pas incompatible.

Cela étant, je l’admets volontiers, ce bulletin, qualifié fort justement de « rapide et léger »,  a une ambition limitée : servir de lien entre les aficionados du contemporain capital et rendre compte de l’actualité célinienne. Est-ce sa longévité ou son indépendance qui agacent tellement ? Le fait est qu’en quelques années les peaux de banane ne lui ont pas manqué. Rappelons qu’il ne bénéficie d’aucune aide si ce n’est la fidélité, renouvelée chaque année, de ses abonnés. Pour son éditeur, c’est le meilleur des encouragements.

  1. Le Journal de la Culture, n° 11, novembre-décembre 2004, pp. 57-65.