Sommaire : Quand Chateaubriand prédisait la venue de Céline… – Le Journal de Rebatet – Céline dans Juvénal – Quand le fantôme de Céline met la Préfecture de police en émoi [archive]
Lectures de Céline
On ne compte plus les grands comédiens qui ont lu Céline : de Michel Simon à Pierre Brasseur en passant par Arletty, Le Vigan, Georges Wilson et bien entendu Luchini. Ce qui n’est guère connu, ce sont les lectures qui n’ont pas fait l’objet de disques. Ces trésors figurent dans les archives de l’Institut national de l’audiovisuel, ayant été diffusés jadis sur les ondes des radios publiques, particulièrement France-Culture. Plusieurs comédiens de grand talent ont, en effet, prêté leur voix à des émissions consacrées à Céline. Citons en vrac Jean-Louis Barrault, Michel Bouquet, Marcel Bozzuffi, Alain Cuny, André Dussolier, Julien Guiomar, Jean Négroni, Michel Piccoli, pour n’en citer que quelques-uns. Celui qui se dégage du lot, à mon sens, est Michel Vitold, excellent dans deux registres différents : un extrait éruptif de Bagatelles et un passage déchirant de Féerie où l’écrivain évoque sa mère décédée alors qu’il était en exil ². Une idée que je soumets à Laurent Vallet, président de l’I.N.A. (nommé en 2015 et renommé à ce poste en 2020) : éditer un disque consacré à Céline reprenant quelques unes de ses lectures d’anthologie.
• Louis-Ferdinand Céline. Mort à crédit. Lecture intégrale par Denis Podalydès. Gallimard, coll. “Écoutez lire”, 2021. Deux disques compacts. Durée : 23 heures. (26,90 €)
- Voyage au bout de la nuit. Louis-Ferdinand Céline. Texte intégral lu par Denis Podalydès. Seize disques compacts sous coffret, Frémeaux & Associés, 2003.
- « D’un Céline l’autre : à Paris et à Copenhague », émission réalisée en trois parties par Jean Montalbetti dans la série « Un homme, une ville ». France Culture, 4, 11 et 18 juillet 1980. Durée : 3 h.
Vient de paraître
Sommaire : Céline et Gide – András Hevesi, premier traducteur de Céline en hongrois (2e partie) – L’Éternel féminin dans Voyage au bout de la nuit
Berl et Céline
Ses relations avec Céline furent pour le moins étonnantes. Lorsque parut Bagatelles pour un massacre, il publia un article dans lequel il relevait que « le lyrisme emporte dans son flux la malice et la méchanceté ». Et d’ajouter : « Juif ou pas juif, zut et zut ! j’ai dit que j’aimais Céline. Je ne m’en dédirai pas ¹. » Un an plus tard, son libéralisme l’incita à condamner l’abus de censure que constituait, à ses yeux, le décret Marchandeau ² qui visait notamment les pamphlets céliniens. Il acceptait, en effet, l’idée de l’antisémitisme politique. Comme le lui reprochait son ami Malraux, il n’avait pas le sens de l’ennemi. Ce qu’il reconnaissait volontiers : « La haine n’est pas mon fort. » La mansuétude dont il fit preuve envers Céline n’était pas un cas particulier si l’on en juge par ces lignes : « Je suis persuadé que son cœur est pur de haine et que la provocation au meurtre fut toujours chez lui, figure de rhétorique. Les Juifs le croient antisémite Ils ont tort. Maurras n’est pas antisémite parce qu’il aime la Raison et qu’il n’est pas démagogue. Il ne vous reproche d’être juif que si vous ne dites pas comme lui… ». Aveuglement ? Libéralisme poussé jusqu’à l’outrance ? Les deux, sans doute… Après la guerre, il considéra que le racisme fut une formidable épidémie des années trente : « On ne parle pas avec indignation d’une épidémie. » Il dira à Bernard Morlino qu’il faut passer l’éponge sur Bagatelles pour ne retenir de Céline que l’inventeur d’un nouveau langage. Mais que restera-t-il de Berl ? Non pas ses pamphlets contre l’esprit bourgeois ou ses essais historiques, mais deux superbes récits parus après la guerre, Sylvia (1952) et Rachel et autres grâces (1965), sortes de confession d’un homme en quête de lui-même. Il rejoint ainsi Céline qui, après la guerre, rejetait la littérature des idées pour ne valoriser que celle où l’émotion prime.
• Emmanuel BERL, Prise de sang (présentation et bio-chronologie de Bernard Morlino ; postface de Bernard de Fallois), Les Belles Lettres, coll. “Le goût des idées”, 2020 (13,90 €)
- Article reproduit dans Le Bulletin célinien, n° 390, novembre 2016. Voir aussi Robert Le Blanc, « Céline et les hommes de Marianne (Berl, Malraux, Fernandez) », Le Bulletin célinien, n° 361, mars 2014.
- Ironie de l’histoire : sous l’Occupation, ce député radical-socialiste soutiendra Pétain et la Révolution nationale.
Vient de paraître
Sommaire : La Société d’études céliniennes à la croisée des chemins – Mirabeau devancier de Céline – Céline dans Candide (2e partie, 1937-1944)
Littérature et pamphlets
• Jean-Charles HUCHET. La joie haineuse (Le moment pamphlétaire de Louis-Ferdinand Céline), L’Harmattan, coll. “Espaces littéraires”, 2020, 302 p.