Sommaire : Luchini, un grand célinien – Bernanos et Céline – Philippe d’Hugues, la Nouvelle Vague et Céline – Andrea Lombardi érige un monument à Céline – Cousteau contre Céline – « L’Année Céline 2015 » – In memoriam Elsa Marianne von Rosen.
A comme Assouline (et Alméras)
• Pierre ASSOULINE, Dictionnaire amoureux des Écrivains et de la Littérature, Plon, 2016, 882 p. (25 €)
- Un dossier lui est consacré dans la dernière livraison de la revue Livr’Arbitres (voir p. 24)
- Émission « Bouillon de culture », Antenne 2, 14 janvier 1994. [ https://www.youtube.com/watch?v=Y8oqiwGwBtQ ]
- Mémoires d’un siècle et de deux continents (à paraître aux Éd. de Paris / Max Chaleil).
Vient de paraître
Sommaire : Arletty, Gauloise de Courbevoie – 1849 : Semmelweis rejeté dans les capitales européennes mais reconnu à Strasbourg – Mauriac, Céline et l’île Saint-Louis – Magique Céline – Antoine Blondin, paladin au XXe siècle – Le colloque sur les pamphlets – L’édition critique du manuscrit de Voyage au bout de la nuit – Avec Céline.
Occupation
Sous l’Occupation même, Céline tenait à distinguer « les idéalistes et spéculateurs en pensées gratuites » et les « collaborateurs efficients : tous ceux qui ont profité des Allemands directement ou par ristournes » ¹. En ce qui le concerne, il tenait à préciser qu’il n’avait « jamais touché un fifrelin de l’occupation ». Vouant par ailleurs aux gémonies la politique de Vichy, il considérait qu’elle constituait une insulte envers ceux qui s’étaient engagés de manière désintéressée dans un combat qui se retournait contre eux : « Faites-vous crever, miliciens, légionnaires, somnambules… » ² Sur cette époque complexe, Philippe d’Hugues (né en 1931) révèle cette confidence d’Henri Amouroux : « Bientôt on ne pourra plus parler de cette période avec des gens de moins de 60 ans » ³. Propos tenu il y a déjà un quart de siècle… Céline déplorait à l’automne 1943 que ceux qui avaient choisi le camp de la collaboration se fissent assassiner « comme des cons et des veaux » sans clamer auparavant certaines vérités. À propos de la Milice, Philippe d’Hugues constate qu’« on ne compte plus les livres, les films ou téléfilms où de vaillants maquisards sont pourchassés durant l’Occupation par des miliciens tortionnaires ». Dans son esprit il ne s’agit évidemment pas de défendre cette formation paramilitaire (dont il mentionne que Brasillach apprit en prison les turpitudes), mais de rappeler tout uniment les faits : « La Milice, créée début 1943, et pour la seule zone sud, ne fut armée qu’en 1944 après l’exécution par la Résistance de près d’une centaine de ses membres sans défense. Ce n’est que fin 1943 et malgré l’hostilité de Laval, qui avait bien prévu les luttes fratricides prochaines qui déjà se préparaient dans l’ombre, que la Milice sera armée et, en janvier 1944, sera autorisée à s’implanter en zone nord. » Et d’ajouter : « C’est surtout dans les trois ou quatre mois derniers mois précédant la Libération, dans un pays plongé dans une guerre civile en train de se généraliser, qu’eurent lieu les fameuses exactions 4. Celles-ci furent surtout commises par des éléments troubles que Darnand eut la faiblesse de recruter pour pallier l’insuffisance des effectifs dont le recrutement devenait de plus en plus difficile. » Ce qu’il y a de terrible, c’est que le seul fait de rappeler ces données factuelles peut donner l’impression de prendre la défense d’un camp par rapport à un autre.
Céline, lui, avait choisi le sien. Ce qui ne l’empêchait pas d’être sagace : « L’alliance franco-allemande actuelle est une alliance avec la charogne. Elle donne la mort à tous ceux qui la pelotent. » 5 Lorsqu’on évoque cette période qui n’a duré que quatre années, il faut toujours avoir à l’esprit que les opinions évoluèrent rapidement en fonction des évènements. En mars 1942, Céline croyait « à une guerre de quinze ans pour le moins, même d’évolution favorable » 5. Un an plus tard, ce fut la chute de Stalingrad qui sonna le glas de bien des espoirs.
- Lettre à Je suis partout, 29 octobre 1943. Repris in Céline et l’actualité, 1933-1961, Les Cahiers de la Nrf (Cahiers Céline 7), Gallimard, 2003, pp. 189-191.
- Lettre à Je suis partout, 3 mars 1944. Ibidem, pp. 194-196.
- Philippe d’Hugues, « Préface » in Robert Brasillach, Six heures à perdre (roman), Pardès, 2016, pp. [7]-15.
- Ces exactions furent condamnées par Pétain le… 6 août 1944. Cf. la lettre qu’il adressa à Laval, chef du gouvernement et ministre de l’Intérieur et la réplique de Darnand. Reproduite par Jean-Claude Valla in La Milice (Lyon 1943-1944), Éditions de la Librairie Nationale (Les Cahiers Libres d’Histoire, n°9), 2002, pp. 97-101.
- Lettre à Henri Poulain, 11 juin 1943 in L.-F. Céline, Lettres des années noires, Berg International, 1994, pp. 38-39.
- Lettre à Frédéric Empaytaz, mars 1942 in David Alliot et Daniel Renard, Céline à Bezons, 1940-1944, Éditions du Rocher, 2008, pp. 122-123.
Vient de paraître
Vilain
Philippe Vilain, lui-même romancier, n’est pas à plaindre : il est édité par deux grands éditeurs (Gallimard/Grasset), adapté à l’écran et couronné par divers lauriers (dont ceux de l’Académie française). Mais pour avoir écrit de telles sottises sur le contemporain capital, il devrait être attentif à son avertissement : « Il est vilain, il n’ira pas au Paradis celui qui décède sans avoir réglé tous ses comptes. »
• Philippe VILAIN, La littérature sans idéal, Grasset, 158 p. (16 €)
- Propos recueillis par Geneviève Simon (« Plaidoyer pour un nouvel horizon littéraire », La Libre Belgique, 26 avril 2016, p. 42).
- Contrairement à ce qu’a pu laisser croire Céline lui-même, son admiration pour l’auteur de la Recherche n’était pas feinte : « Proust est un grand écrivain. C’est le dernier grand écrivain de notre génération » (Céline à Meudon. Transcription des entretiens avec Jacques d’Arribehaude et Jean Guenot, Éditions Guenot, 1995, p. 44).
- Cf. Henri Godard, À travers Céline, la littérature, Gallimard, 2014.
- Luc Ferry, « Célébrer Céline ? », Le Figaro, 29 janvier 2011.